La sélection 2024 du Prix du roman d’écologie est disponible. Six ouvrages qui racontent les enjeux écologiques à travers des récits sensibles et interrogent notre époque.
Dystopie, thriller, roman rural, éco-fiction, aventure militante, fable antispéciste… Au-delà des essais politiques et des ouvrages scientifiques qui tirent la sonnette d’alarme, les enjeux écologiques se font aussi une place parmi les romans sur les tables des libraires.
Qu’ils interrogent nos liens au territoire, imaginent un futur au climat déréglé, questionnent les liens entre humains et autres vivants ou fassent dialoguer les générations, les romans d’écologie nous aident à penser l’époque. Comme le souligne le manifeste du Prix du roman d’écologie, la littérature est en effet une forme artistique particulièrement pertinente pour « associer la quête intime, les rêves et l’invention du monde ».
Une mine de conseils de lecture
Depuis 2018, l’association du Prix du roman d’écologie s’attache à mettre en valeur ces propositions artistiques. En 2023 (lire notre article), le Prix avait été décerné à Annie Lulu pour son deuxième roman, Peine des Faunes, récit aux racines écoféministes tissant des liens entre l’urgence écologique et les violences faites aux femmes par un voyage sur deux continents et cinq générations.
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Cette année, le jury est composé d’une mosaïque d’écrivain·es et d’acteur·ices de l’écologie. On y retrouve entre autres Lucile Schmid, cofondatrice de la Fondation de l’écologie politique, le journaliste Rémi Baille ou les auteur·ices Dalibor Frioux, Alexis Jenni et Laure Limongi. Il compte également des représentant·es des partenaires du Prix (L’Obs, La Poste, la BnF) et d’un panel d’étudiant·es de l’École nationale du paysage et de l’École nationale supérieure d’arts de Paris-Cergy.
La cérémonie de remise du Prix se tiendra le 14 mai prochain et consacrera l’ouvrage lauréat parmi les six ouvrages sélectionnés pour l’édition 2024.
Et vous passerez comme des vents fous, Clara Arnaud – Actes Sud
« Gaspard, un berger pyrénéen, s’apprête à remonter en estive avec ses brebis, hanté par l’accident tragique survenu la saison précédente. Dans le même temps, Alma, une jeune éthologue, rejoint le Centre national pour la biodiversité, avec le projet d’étudier le comportement des ours et d’élaborer des réponses adaptées à la prédation.
Sur les hauteurs, les deux trentenaires se croisent de loin en loin, totalement dévoués à leurs missions respectives. Mais bientôt les attaques d’une ourse les confrontent à leurs failles. Les audaces de la bête ravivent les peurs archaïques, révélant la crise du pastoralisme et cristallisant des visions irréconciliables de la montagne : elle devient l’ennemie à abattre.
Dans cette vallée où jadis le dressage des ours était une tradition, la réintroduction du plantigrade exacerbe les tensions. »
Le jour des caméléons, Ananda Devi – Grasset
« Une île : Maurice, la narratrice du roman. Quatre personnages : un oncle las de la vie, sa nièce, unique lumière pour lui, une femme qui vient de quitter son mari, un chef de bande assoiffé de vengeance. Une journée où tout va exploser : la cité, les haines, peut-être l’île. Enfin, d’étranges animaux qui attendent patiemment que les humains finissent de détruire ce qui leur reste – leur humanité, leur foyer – pour vivre seuls, en paix : les caméléons.
Unité de lieu, de temps, d’action. Le compte à rebours est lancé, le drame peut commencer. Mais reprenons. Le roman s’ouvre, la ville est à feu et à sang. Zigzig, le caïd meneur, tient dans ses bras une fillette ensanglantée. Les plus pauvres viennent de s’attaquer aux plus riches dans le centre névralgique de l’île : le shopping center, désormais en ruines. Au loin, un volcan gronde. Comment en sommes-nous arrivés là ? Quelques heures plus tôt, Zigzig partait avec les siens attaquer ses rivaux tandis que Sara regardait danser une femme libérée sur une plage abandonnée. »
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Humus, Gaspard Koenig – Les Éditions de l’Observatoire
« Deux étudiants en agronomie, angoissés comme toute leur génération par la crise écologique, refusent le défaitisme et se mettent en tête de changer le monde. Kevin, fils d’ouvriers agricoles, lance une start-up de vermicompostage et endosse l’uniforme du parfait transfuge sur la scène du capitalisme vert. Arthur, enfant de la bourgeoisie, tente de régénérer le champ familial ruiné par les pesticides mais se heurte à la réalité de la vie rurale.
Au fil de leur apprentissage, les deux amis mettent leurs idéaux à rude épreuve. Du bocage normand à la Silicon Valley, des cellules anarchistes aux salons ministériels, Gaspard Koenig raconte les paradoxes de notre temps – mobilité sociale et mépris de classe, promesse de progrès et insurrection écologique, amour impossible et désespoir héroïque… Une histoire de terre et d’hommes, dans la grande veine de la littérature réaliste. »
Feu le vieux monde, Sophie Vandeveugle – Denoël
« L’aube s’ouvrit sur un ciel de fumée. La ville, entourée de collines qui la regardaient, semblait bien frêle là-dessous, presque prise en étau, et n’avait plus pour horizon que ce ciel anthracite qui, à mesure que se levait un soleil de feu, s’orangeait. »
« La petite ville de Bas-les-Monts a subi la mobilisation de ses jeunes et vit, depuis, au rythme des avions et sous la menace. L’ennemi est d’une inhabituelle envergure, la ligne de front se déplace au gré des vents : en ce nouvel été caniculaire, ce sont d’effroyables incendies que les appelés combattent. Séparés de leurs familles, Nino, Joseph, le Moineau et les autres découvrent la camaraderie de la troupe et les limites de la docilité. Sous les frondaisons de la forêt suppliciée, le règne animal paie lui aussi un lourd tribut à cette guerre moderne…
Ardente et engagée, cette fable confie à la jeunesse la capacité de lucidité, le pouvoir de l’indignation et la volonté d’inventer l’avenir. »
Orchidéiste, Vidya Narine – Les avrils
« Sylvain est orchidéiste. Chaque jour, il prend soin de ses fleurs pour une clientèle exigeante. Des orchidées, il sait tout : la symbolique, l’aventure de leur découverte et les ravages sur la nature de leur commercialisation massive. Aujourd’hui, il aimerait céder sa boutique. Mais dans sa famille, une dynastie d’industriels lorrains, on n’a pas su comment transmettre. Alors, pour mieux habiter l’avenir, Sylvain répare les racines abîmées du passé. »
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Dans la Réserve, Hélène Zimmer – P.O.L
« Le chantier du mur érigé par la Wild French Réserve (WFR), entre les espèces protégées et le reste du territoire, est achevé. En se confrontant à ce mur, les trois protagonistes du roman, en proie chacun à des bouleversements personnels, racontent trois expériences sensibles de la crise écologique et de la sauvagerie capitaliste.
Arnaud, marginal, s’est donné les moyens de vivre la vie qu’il désirait, une vie d’autosuffisance et de solitude. Un avis d’expulsion met brutalement fin à ses rêves. Arnaud ne revient pas en arrière. Il se fond dans le territoire et l’état sauvage. Nassim, journaliste, relate le combat de la résistance écologique, mais quand sa compagne, Solveig, lui annonce qu’elle veut faire un enfant seule alors que grandit son désir de paternité, la nouvelle est une déflagration. À la fin de son service civique, Eva-Lou décide de quitter sa coloc’ pour faire une pause chez sa mère. La tendresse du foyer la maintient dans une posture de post-adolescente avec laquelle elle rompt brutalement en s’engageant comme éco-sentinelle à la WFR. Ce contrat passé avec la société militaire privée la pousse à une émancipation vertigineuse. Elle se voit catapultée dans une mission spéciale. Une bête autrement plus sauvage que les bisons et les loups a franchi le mur. »