Les micro-festivals ont le vent en poupe ! À l’heure où certains acteurs dupliquent les modèles et les offres artistiques, d’autres font le pari de l’expérience singulière : jauges réduites, programmation multiforme, mise en valeur du cadre environnant… À Sarzeau, commune bretonne située sur la presqu’île de Rhuys, le festival éco-citoyen et pluridisciplinaire La P’Art Belle fignole les derniers détails de sa deuxième édition qui se déroulera les 31 juillet et 1er août prochain. Rencontre avec Louise Robert, fondatrice du festival, qui milite pour que la culture ramène du beau dans notre société.
Après une première édition pleine de promesses en 2019, le festival La P’Art Belle revient en 2021 avec une programmation toujours plus éclectique entre musique, danse, théâtre, projections, ateliers et débats. Située dans le superbe parc arboré de 30 hectares du domaine de Kerlevenan à Sarzeau, la manifestation propose une fois encore de prendre le temps d’écouter, de discuter et de vivre une expérience intimiste et singulière.
Autour du château de style italien datant du XIIIe siècle, le village découverte et l’espace scène s’apprêtent à voir défiler artistes et acteurs engagés et inspirants. Le tout dans cet esprit de découverte et de valorisation des initiatives enthousiasmantes qui fourmillent sur le territoire breton.
Après une dizaine d’années passées au sein du secteur musical, vous décidez de franchir une nouvelle étape en créant votre propre festival : La P’Art Belle. Quel a été le cheminement ?
« J’avais envie d’agir, sans trop savoir comment transformer les choses à mon échelle. »
Louise Robert : Originaire de La Roche Bernard, en Bretagne, j’ai grandi dans une famille de musiciens et bénévoles qui montaient des spectacles sur le territoire. Je suis tombée dedans quand j’étais petite. J’ai ensuite fait des études de communication, avec comme objectif de travailler dans le milieu du spectacle vivant. Après plusieurs expériences, notamment aux Francofolies de La Rochelle et au centre FGO Barbara à Paris, j’ai commencé à m’interroger sur le sens que je souhaitais donner à mon métier. J’étais toujours passionnée, mais ce que je faisais ne correspondait plus tellement à ce que je voulais défendre. Les questions sociales et environnementales se bousculaient dans ma tête. J’avais envie d’agir, sans trop savoir comment transformer les choses à mon échelle.
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L’art est un super outil pour sensibiliser les publics. Les sujets environnementaux peuvent souvent être anxiogènes, mais les multiples formes artistiques permettent de faire rêver, de réunir les gens d’univers très différents autour d’une histoire. Par ailleurs, j’ai collaboré avec Dominique A sur le collectif Des Liens, qui a pour objectif de faciliter l’accès à la culture aux plus démunis. C’est sur ces réflexions qu’est né le festival La P’Art Belle.
Comment traduire ses convictions environnementales et sociétales dans l’organisation d’un festival ?
« Être un terrain d’expérimentation pour tester de nouvelles façons de produire un événement. »
Si la programmation aborde ces sujets, la manifestation se doit d’avoir une certaine exemplarité. Dans mes différentes expériences en événementiel, j’ai vu le gaspillage, les problématiques liées à la consommation énergétique et, plus largement, l’impact écologique que représente un festival. Alors, j’ai imaginé La P’Art Belle comme un laboratoire éco-engagé, où tout est pensé pour limiter au maximum son empreinte écologique : scène éco-conçue, communication responsable, utilisation du FALC (Facile à lire et à comprendre) et démarche globale autour de l’accessibilité, restauration en circuit ultra-court, énergie 100% renouvelable etc. Le festival est devenu un vrai terrain d’expérimentation pour tester de nouvelles façons de produire un événement.
La question de l’expérience des festivaliers est également au cœur de vos réflexions, entre les jauges réduites, la programmation pluri-disciplinaire ou encore cette invitation à ralentir…
La question de la jauge est fondamentale. Même si le site fait 30 hectares, l’objectif est de limiter le nombre de festivaliers. Le Golfe du Morbihan est un territoire très touristique, particulièrement à cette période, et notre manifestation ne doit pas faire augmenter de manière déraisonnable la fréquentation de la région. Au départ, notre jauge était fixée à 1 500 personnes. Cette année, avec le contexte sanitaire, nous l’avons baissée à 1 000 personnes. Faire un festival à taille humaine, c’est aussi parler plus directement au public, les sensibiliser de manière concrète, ludique et artistique.
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L’autre grand sujet concerne la programmation. Nous l’avons voulue multiforme et accessible pour toutes les générations. On propose plusieurs formats, entre des concerts, des spectacles, des projections, des ateliers ou encore des conférences. Quand on vient au festival, chacun peut y trouver son bonheur.
« Souvent, quand on va dans un festival, le temps manque. »
Aussi, je voulais aborder la question du temps. Souvent, lorsqu’on va dans un festival, le temps manque. On voit des bouts de spectacle, on court d’une scène à l’autre, on oublie les artistes qu’on vient de voir et on s’épuise. Et, à la fin de la journée, on regarde son compte Insta pour voir ce qu’on a vu comme concerts. Avec La P’Art Belle, j’ai voulu imaginer une autre façon de vivre ce moment. Aucun concert se chevauche, et nous proposons même un temps de pause d’une heure pour permettre aux gens de manger.
Vous organisez le Festival La P’Art Belle en Bretagne au milieu de l’été, période où l’offre culturelle est particulièrement riche et où la fréquentation touristique à tendance à saturer la région, avec les conséquences environnementales qu’on connaît. À terme, un festival comme La P’Art Belle n’a-t-il pas vocation à se dérouler hors saison ?
C’est un vrai sujet. Peut être qu’un jour, on changera nos dates. Pour l’instant, c’est la disponibilité de l’équipe qui prime, étant donné que nous sommes tous bénévoles.
Aussi, l’un des points importants pour beaucoup d’organisateurs d’événements en Bretagne, c’est la météo. On prend moins de risque en été. Mais c’est vrai qu’on pourrait tenter une période hors saison, en juin ou en septembre. On en a d’ailleurs parlé avec le directeur de Vannes Tourisme qui est très intéressé par le projet.
Quels sont les temps forts de cette deuxième édition, qui se déroulera le samedi 31 juillet et le dimanche 1er août ?
Deux temps forts musicaux auront lieu le samedi en fin de journée : un concert de Frederika Stahl, qui a notamment composé la bande originale du documentaire Demain de Cyril Dion et Mélanie Laurent, et une rencontre inédite entre le batteur Cyril Atef et le producteur Jean-Phi Dary, co-créateur du projet The Paradox avec Jeff Mills. Une table-ronde participative autour du monde que nous rêvons pour demain sera également organisée. Ce sera une grande session d’inspiration collective, chacun pourra prendre la parole.
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Au Village découverte, nous proposons des ateliers sur la cuisine zéro déchet et sur l’éco-conception. La première journée se clôturera par une performance visuelle projetée sur la façade du château.
Le dimanche, des jeux pour enfants et pour adultes, une balade éthno-botanique et une initiation à la lacto-fermentation des légumes seront proposés dans l’après-midi. À noter également, une grande table-ronde sur l’alimentation et les initiatives concrètes sur le territoire. Dans la soirée, le public découvrira un spectacle de danse de la compagnie lorientaise Atypik, puis deux concerts : le chanteur israélien Eyål Naim et l’artiste belgo-camerounaise Lubiana.
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