Du 30 mai au 2 juin 2024, le festival Échappée Belle revient s’installer dans le parc de Fongravey, près de Bordeaux. L’événement, co-organisé par la Scène nationale Carré-colonnes, met à l’honneur la diversité du spectacle vivant – théâtre, cirque, musique, danse – et réaffirme le rôle de la culture dans la construction du vivre-ensemble et face à l’urgence écologique.
Depuis 32 ans, le festival Échappée Belle accueille des artistes sur des scènes installées à travers les 14 hectares du parc de Fongravey de Blanquefort (Gironde), reliées par des chemins dans les bois. Des milliers de festivalier·es reviennent édition après édition découvrir la programmation éclectique faite de concerts, de cirque, de danse et de théâtre.
Derrière l’événement, on retrouve la scène nationale Carré-Colonnes, la Ville de Blanquefort et un réseau associatif d’éducation populaire (ABCS), qui s’interrogent collectivement sur le rôle citoyen d’un festival face à l’urgence écologique et sociale.
Une programmation familiale, mais pas que
« Les spectacles parlent chacun à leur manière du monde qui nous entoure » explique Bénédicte Brocard, directrice du production du festival. Ainsi sont programmés à Échappée Belle les clowns de la compagnie blanquefortaise La tendresse du Gravier qui mettent en scène avec poésie et humour grinçant deux personnes sans-abri désirant voir la mer.
De même, lorsque la Compagnie du Terrain propose un spectacle autour du football, PSG4EVER, elle le fait pour raconter en creux les histoires intimes et familiales qui se jouent sur les canapés de salon. Et avec son spectacle Mirage, la compagnie Dyptik appelle, par un joyeux mélange de danses urbaines du monde entier, à la convivialité et à faire corps ensemble.
Les spectacles parlent chacun à leur manière du monde qui nous entoure
« Les arts du cirque, du théâtre, de la danse permettent d’aborder par le corps, en se passant de mots, des sujets qui nous travaillent tous·tes, explicite Bénédicte Brocard. Ce sont des narrations qui portent des regards sensibles sur nos manières de vivre-ensemble. Des moments où l’on est ensemble et où l’on se forge des imaginaires collectifs ».
Parmi la vingtaine de spectacles au programme, on retrouve côte-à-côte des compagnies émergentes – parfois accompagnées et soutenues au long cours par le festival – et des compagnies plus expérimentées qui ont des fidélités de longue date avec le festival. « Il arrive que les enfants d’il y a 30 ans viennent avec leurs propres enfants voir des compagnies qu’ils/elles avaient vu à leur âge »raconte amusée Bénédicte Brocard.
Fête cyclable
Les fêtard·es-cyclistes de l’association Slowfest seront présents le dimanche pour animer une parade à vélo musicale, du centre-ville de Bordeaux au festival. Parce que « venir au festival à vélo, c’est déjà le festival », justifie le programme d’Échappée Belle.
Cette Slow parade résonne avec l’enquête menée pendant l’édition 2023 montrant que l’écrasante majorité des festivalier·es venait en voiture. Et ce malgré la gare SNCF, la ligne de tram et les pistes cyclables à proximité du site. Pendant l’année écoulée, l’équipe du festival a donc travaillé aux côtés du Département de la Gironde et d’autres festivals sur les manières d’orienter les publics vers les mobilités douces.
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« Pour les déplacements de loisirs, les changements de comportements sont parfois lents. Alors on essaye de montrer que non seulement c’est possible de venir à vélo, même en famille, mais en plus ça peut être un bon moment » résume Bénédicte Brocard.
Le festival propose alors aux festivalier·es de planifier leur trajet en avance, avec l’outil gratuit Géovélo, et prévoit un accueil spécifique aux cyclistes sur place, avec un parking vélo, des bonbonnes d’eau et même un jeu concours dédié.
D’autres manières de faire culture
Mais au-delà des initiatives d’éco-responsabilité et de sobriété, conditionnées par le cadre naturel et l’ADN engagée des structures porteuses, le festival se pense aussi comme un moment de sensibilisation citoyenne tournée vers son territoire et les enjeux écologiques. D’autant que les deux premières journées du festival sont dédiées au public scolaire, accueillant près de 4 000 élèves.
Sur place, une dizaine d’associations locales sont placées au cœur de l’événement, profitant d’un gain de visibilité dans l’espace de restauration. Plusieurs outils pédagogiques sont déployés à destination des classes et du grand public : ateliers découverte de la biodiversité, panneaux de présentation des espèces naturelles du parc, sensibilisation au zéro déchet pendant les pique-niques scolaires…
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Autant d’initiatives qui dépassent ce qui est habituellement attendu d’un événement culturel. « On est à notre place avec ce type de projet estime toutefois Bénédicte Brocard, ça semble évident pour toute l’équipe, d’abord parce qu’on a la chance de pouvoir jouer dans ce parc magique donc on doit en prendre soin, mais aussi parce qu’on est des citoyen·nes témoins des dérèglements climatiques et de ses conséquences ».
En ce sens, la scène nationale Carré-Colonne a placé ses dernières années les liens entre arts et écologie au cœur de son identité. À l’image du projet Paysages en partage qui cultive le lien des élèves d’écoles primaires du territoire avec le paysage de l’estuaire de la Gironde, à travers des spectacles, ateliers et sorties nature. Un petit carrelet, cabane de pêche typique du paysage local, sera d’ailleurs installé au cœur du festival pour sensibiliser le public au biotope local.
Ce déplacement de l’identité et des fonctions habituelles d’un festival et d’une scène nationale donne à voir de nouvelles manières de faire culture, plus ancrées et adaptées à l’urgence écologique, à même d’inspirer bon nombre d’institutions culturelles.
Retrouvez la programmation du festival Échappée Belle sur le site de la scène nationale Carré-Colonnes.