À l’heure où le gouvernement prépare une loi destinée à façonner l’agriculture française à l’horizon 2040, deux associations écologistes appellent le monde agricole et les pouvoirs publics à soutenir massivement l’agroécologie. Plus autonomes, plus économes et ancrées sur le territoire, les fermes agroécologiques sont présentées comme les plus à même de « faire face aux chocs actuels et à venir ».
En ouvrant le dernier rapport du Réseau Action Climat (RAC), on se heurte une fois de plus à la longue liste des menaces qui pèsent sur l’agriculture française. Sécheresses à répétition, disparition de la population agricole, crises énergétiques… La sonnette d’alarme commence à s’user. Alors cette fois-ci, le RAC s’est associé avec le Réseau CIVAM (centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural) pour regarder du côté des « modèles agricoles qui s’en sortent mieux que d’autres ».
Sous la plume très didactique de Cyrielle Denhartigh, spécialiste des liens entre agriculture, alimentation et changements climatiques, le rapport met en avant l’agroécologie comme une « clé de la résilience » du système alimentaire français. Ce modèle d’agriculture, qui représente aujourd’hui moins de 10% de la surface agricole utile (SAU) en France, est présenté comme une alternative crédible et capable de s’adapter face à la multiplication des crises à venir.
« Le modèle actuel spécialisé, mécanisé et endetté, ne résiste plus aux chocs »
Avec ce document-plaidoyer, le Réseau Action Climat et le Réseau CIVAM espèrent nourrir le débat public, à l’heure où une loi d’orientation agricole destinée à façonner l’agriculture de la prochaine décennie se prépare. Et pour cela, l’autrice s’appuie principalement sur des rapports du GIEC et d’organismes aux noms abscons, directement rattachés aux ministères : Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONARC), Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER)…
Pourquoi l’agroécologie est-elle plus résiliente ?
En pratique, l’agroécologie passe par la déspécialisation des fermes, c’est-à-dire la diversification des cultures parfois associées avec l’élevage. Des parcelles plus petites, mais plus nombreuses, permettent aux agriculteur·rices d’organiser une rotation sur les sols entre céréales, légumineuses et prairies temporaires.
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L’agroécologie, c’est le retour des haies, des mares et des arbres dans les cultures, atouts majeurs pour résister aux fortes chaleurs et réguler les inondations. C’est aussi l’enherbement des vergers, l’utilisation de semences paysannes ainsi que la suppression des traitements phytosanitaires et des engrais de synthèse. Autant de manières de réduire la dépendance aux intrants et aux énergies fossiles.
« L’agroécologie est la voie la plus à même de contrer les menaces que constituent ces crises et de garantir la souveraineté alimentaire de la France »
Toutes ces pratiques ont vocation à « travailler avec la nature » et à s’adapter au contexte local. Elles favorisent la biodiversité, la fertilité des sols, l’infiltration de l’eau, et la résistance aux évènements extrêmes. La diversification des cultures permet aussi aux fermes d’être plus résilientes économiquement, en évitant de « mettre tous les œufs dans le même panier ».
Le rapport insiste sur les dynamiques collectives d’entraide, de vente locale, de partage des connaissances et des savoir-faire locaux qui caractérisent les modèles agroécologiques. Le Réseau Action Climat et le Réseau CIVAM y voient alors une piste de solution pour lutter contre l’isolement et le surmenage, aujourd’hui causes principales du « mal-être agricole ».
Les deux organisations concluent le rapport sur une demande explicite : « l’agroécologie doit être massivement soutenue par les pouvoirs publics et le monde agricole ». Car si la solution parfaite n’existe pas, l’agroécologie est mise en avant comme une « solution sans regret ». La formule sous-entend que l’ensemble des financements orientés vers l’agroécologie ne sont jamais vains puisqu’ils participent directement à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à freiner l’érosion de la biodiversité.