Le mercredi 2 août 2023, l’humanité a consommé l’ensemble des ressources que la planète peut régénérer en une année. C’est le « jour du dépassement » à partir duquel nous vivons à crédit. En 1971, cette date symbolique était encore au 25 décembre.
L’indicateur est calculé par l’ONG américaine Global Footprint Network, pour interpeller sur nos modes de vie trop gourmands en ressources naturelles. Et lorsqu’il est estimé à l’échelle des pays, il fait apparaître de grandes disparités. Si tous les humains vivaient comme des Américains, les ressources seraient épuisées le 13 mars – et le 5 mai pour les Français·es –, tandis que des pays comme l’Inde ou l’Uruguay n’ont pas de « jour du dépassement ».
Face à cette donnée choc, les artistes ont le pouvoir de rendre visible et sensible la crise écologique, afin de changer nos perceptions et nos manières de vivre. Focus sur 5 œuvres d’art qui interpellent avec créativité sur les limites planétaires.
Too too much much de Thomas Hirschhorn
Dans le monde de Thomas Hirschhorn, on ne peut plus jeter les objets usagés, on doit vivre avec. Le plasticien suisse se fait un plaisir d’ensevelir des lieux du quotidien sous une masse d’objets de consommation, avec la canette comme objet phare. Ses installations surréalistes sensibilisent à la surconsommation, à la gestion des déchets et apparaissent comme « un puissant symbole du trop grand appétit de notre société ». Ce même appétit qui est à l’origine de l’épuisement des ressources. L’œuvre s’adresse également au monde de l’art, l’appelant à sortir des logiques « qui poussent les artistes à faire plus, à faire trop ».


Support de Lorenzo Quinn
Lors de la Biennale de Venise en 2017, le sculpteur italien Lorenzo Quinn a voulu interpeller les visiteur·euses sur le risque de disparition de la Cité des Doges. En moins d’un siècle, le niveau de la mer a augmenté de 35 centimètres, et les épisodes d’ »acqua alta » – des marée exceptionnelles – se multiplient sous l’effet du dérèglement climatique. Lorenzo Quinn a installé deux bras géants de 9m de haut, s’agrippant à l’hôtel vénitien historique Ca’ Sagredo pour porter un appel à l’aide, et à l’action, à destination de la communauté internationale.

Le bruit des icebergs de Caroline Gagné
Pendant plusieurs semaines, la Québécoise Caroline Gagné a filmé et enregistré les sons d’un iceberg à la dérive, près de Terre-Neuve, au Nord-Ouest du Canada. Elle a ensuite diffusé les enregistrements à travers une grande vitre installée au Musée d’art contemporain de Montréal. Soumise aux basses fréquences des sons de l’iceberg, la vitre tremble et donne un second corps au géant de glace qui disparaît. Tout en fragilité et en poésie, Le bruit des icebergs rend la fonte des glaces, souvent perçue comme lointaine et abstraite, plus réelle que jamais.

Captive Landscapes de Daniel Kukla
Dans quel environnement vivent les animaux de zoo ? Pour parler du rapport entre les humains et la nature, le photographe Daniel Kukla s’est penché sur les habitats artificiels dans les zoos d’Europe et des États-Unis. Intitulé « Paysages en captivité », sa série de photos nous plonge dans des fausses jungles, plages ou savanes, pâles copies de milieux naturels. En filigrane, on voit apparaître la tendance des sociétés modernes à considérer la nature sauvage comme une simple ressource à contrôler et à utiliser pour son bien-être.



Pollution Pods de Michael Pinsky
Dans la cour du Somerset House de Londres, en 2018, l’artiste Michael Pinsky a installé cinq bulles offrant un voyage singulier. En les parcourant, les visiteur·euses pouvaient humer successivement l’air pur de l’île de Tautra, en Norvège, puis celui de New Delhi, Sao Paulo, Pékin et Londres. Sans surprise, les quatre dernières, qui possèdent la plus mauvaise qualité de l’air au monde, ont souffert de la comparaison. L’installation visait à rendre tangible les effets désastreux de la pollution de l’air pour la santé et le confort de vie. Un rappel nécessaire lorsqu’on sait qu’elle fait perdre en moyenne 16 mois d’espérance de vie aux Londonien·nes.
