Un groupement international de scientifiques appelle à constituer une bibliothèque mondiale de la biophonie sous-marine. Des archives sonores qui viendront souligner l’importance de l’écoute de la nature, ainsi que l’incidence – souvent oubliée – de la pollution sonore humaine sur la vie aquatique.
Le silence des abysses ne serait-il qu’un mythe ? C’est bien ce que soulignent 17 scientifiques issus de 9 pays, dont la France. Regroupés au sein du Programme International de recherche de l’océan silencieux (IQOE), ils estiment que de multiples sons proviennent aujourd’hui de 126 mammifères marins, ainsi d’une centaine d’espèces de mollusques et de crustacés ou d’un millier de poissons différents.
Pour mieux comprendre et protéger la faune aquatique, ces chercheurs proposent, dans la revue Frontiersin, d’enregistrer et archiver cette symphonie aquatique au sein d’une même plateforme. Les enregistrements seront compilés depuis diverses banques sonores, comme celle de la sonothèque du Muséum national d’histoire naturelle, donnant lieu à une bibliothèque partagée et ouverte au public.
Tendre l’oreille pour protéger le vivant
Ce travail d’information aura également la vertu d’informer et de sensibiliser aux enjeux de la pollution sonore humaine sur la nature. « La biodiversité mondiale est en déclin et que le paysage sonore sous-marin est altéré par les activités anthropiques », déclarent les chercheurs. L’accroissement du fret maritime ou les perturbations produites par diverses activités humaines ont un impact non négligeable sur la faune et la flore aquatiques, sur le court comme le long terme.
De plus, le phénomène d’acidification des océans, par l’augmentation des émissions de dioxyde de carbone, a lui aussi un impact sur la distance des sons sous l’eau. De quoi nourrir notre réflexion sur la trace que nous laissons derrière nous. « Alors que la biodiversité mondiale est en déclin et que le paysage sonore sous-marin est altéré par les activités anthropiques, nous avons besoin de documenter, de quantifier et de comprendre les sons biologiques et leurs sources – avant, peut-être, qu’elles ne disparaissent », soulignent encore les scientifiques de l’IQOE.
Ces derniers précisent la portée scientifique de ces observations, qui permettraient la cartographie des espèces, de leurs dynamique de population et leurs réactions à l’activité humaine. Et pointent également une dimension artistique où chacune et chacun aurait la possibilité de se relaxer sur le chant des baleines ou le bruissement des raies mantas. Et ainsi de se rapprocher un peu plus encore du vivant qui nous entoure. En attendant, un schéma est mis à disposition (en anglais) pour décrire le fonctionnement de cette future bibliothèque.