Alors même que 68% se trouvent à moins de 5 kilomètres d’une gare, beaucoup de festivals ne sont pas en mesure de proposer une offre ferroviaire solide à leurs festivalier·es. Grâce à l’émergence de projets et la constitution de réseaux sur cet enjeu, les organisateur·ices de festivals et les acteur·ices du secteur ferroviaire se rapprochent. Le début d’une dynamique prometteuse pour la décarbonation des festivals.
Sur le chemin des Nuits Sonores 2023, le DJ Mac Declos a été mis au défi de composer un titre en deux heures, soit le temps de trajet Lyon-Paris en TGV. Un challenge relevé haut la main par l’artiste avec le titre PART 6617 nommé d’après le numéro de son train. Lancée par le festival d’électro lyonnais et la SNCF, l’opération visait à réduire l’empreinte carbone de l’événement en encourageant les festivalier·es à privilégier le train pour aller faire la fête en terres lyonnaises.
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En effet, le transport du public représente en moyenne la moitié du bilan carbone des festivals, largement dominé par les émissions causées par la voiture et l’avion. À cela se rajoutent les problèmes de logistique liés aux embouteillages et au parking. D’où la volonté d’une partie des organisateur·ices de se tourner vers le train pour accélérer leur transition écologique. D’autant plus qu’une récente étude révèle que la grande majorité des festivals, 68%, se trouvent à moins de 5 km d’une gare et 47% à moins de 2 km.
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À l’origine de cette étude, on retrouve Benoît Lanusse, créateur de l’agence Ferroviaire démocratique. Ce passionné de trains, urbaniste de formation, s’est mobilisé pour la création d’un RER toulousain au sein du collectif Rallumons l’étoile avant de s’intéresser au monde de la culture. Il essaye désormais de jouer un rôle d’intermédiaire et de catalyseur en faveur de ce qu’il appelle le « ferroviaire culturel ».
Rapprocher deux mondes qui ne se parlent pas
« Pour moi, l’objectif c’est qu’à l’automne 2025 il y ait plus de 200 festivals en France qui puissent lancer leur pack TER tout ficelé pour 2026 », a-t-il annoncé ce lundi 15 janvier à l’occasion de son webinaire « Les trains des festivalier·es » regroupant professionnel·les de la culture et des mobilités.
Cela commence par de la formation. Car de l’aveu des organisateur·ices qui ont mis en place des trains pour leur festival, le monde ferroviaire s’apparente parfois à un labyrinthe. SNCF Réseau pour les infrastructures, SNCF Voyageurs pour les trains, les conseils régionaux pour les financements, SNCF Gares et connexions…
Mais rien d’infranchissable. Le festival Cabaret Vert s’est entendu avec la SNCF et la région Grand Est pour mettre en place un train de nuit d’après-concerts vers Reims et des tickets « retour à 1 euro » vers les gares de la région. Et du côté de l’Isère, le pack TER + concert du festival Jazz à Vienne proposé depuis plusieurs années à un tarif avantageux a su convaincre le public. « Depuis 2017, on est passé de 70 personnes à plus de 350 personnes par soir par train et parfois jusqu’à 700 personnes » témoigne Christophe Toni, chargé des mobilités pour Jazz à Vienne.
Les formations bientôt proposées par Ferroviaire démocratique, tout comme la Fresque de la mobilité culturelle, peuvent réduire la distance entre acteurs de la mobilité et acteurs culturels. Sans oublier le public. « Il faut se mettre à la place des festivalier·es » rappelle Benoît Lanusse qui préconise de mettre l’accent sur le confort et la praticité, plus à même de convaincre que les arguments économiques ou écologiques.
À chaque région sa solution
Avec le projet Festivals en mouvement lancé en 2023 par le collectif R2D2, une cinquantaine de festivals ont décidé de se lancer ensemble dans l’aventure des mobilités durables. Et cet esprit d’équipe prend tout son sens quand le sujet du train est mis sur la table. Face aux volontés politiques différentes d’une région à l’autre, la mise en réseau et la définition d’une voix commune peut permettre aux organisateur·ices de se faire entendre.
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Benoît Lanusse appelle les acteurs culturels à initier une « dynamique partenariale » à l’échelle des régions pour expérimenter dès 2024 des pratiques adaptées à chaque territoire. Car le sujet n’est pas le même en Île-de-France, où 88% des festivals se situent à moins de 2 km d’une gare, qu’en Nouvelle Aquitaine où ce chiffre tombe à 37%. Il propose également de créer des programmes régionaux « Des TER pour les festivalier·es » offrant un cadre stimulant au triangle Région-SNCF-festivals. Autant de premiers pas destinés à remettre les festivals sur de bons rails.
Pour en savoir plus sur cette thématique, rendez-vous à l’espace DD des BIS de Nantes jeudi 18 janvier en salle G à 10h40 pour la masterclass « Mobilités douces et partagées : comment influer sur les comportements du public ? Les conseils et trouvailles du festival des Pluies de Juillet ». Retrouvez la présentation du projet « Festivals en mouvement » mercredi 17 janvier à 17h15 en salle G.