Après avoir sillonné la France en caravane pour aider ses abonné·es à transformer leurs modes de vie, elle lance son talk-show entièrement dédié à l’écologie. Sur scène, elle invite des expert·es du sujet, crée une bulle d’intimité, et aborde avec eux/elles leurs luttes, leurs pensées, et leurs doutes. Les blagues fusent et les messages passent. Rencontre avec l’infatigable Swann Périssé à l’occasion du lancement de Y’a plus de saisons.
Construire une ruche, faire un don d’ovules, avoir un dressing éco-responsable… Depuis plusieurs années, Swann Périssé s’appuie sur son talent d’humoriste et sa notoriété sur YouTube pour parler de féminisme et d’écologie autrement. « Moins connue mais plus heureuse », elle partage son quotidien et ses expériences avec une autodérision légendaire, abordant au passage les sujets engagés qui lui tiennent à cœur.
Après plusieurs années à se concentrer sur la vidéo, Swann est de retour sur scène cet automne. À côté de son nouveau spectacle, encore en rodage au République, elle lance son propre talk-show, Y’a plus de saisons, disponible en podcast et sur Youtube.
J’invite des gens qui savent de quoi ils/elles parlent, et moi je me débrouille pour que ce soit drôle
Devant le public du théâtre de l’Européen, elle accueille l’ingénieur Jean-Marc Jancovici, la militante Camille Étienne, l’économiste Timothée Parrique ou encore l’essayiste Fatima Ouassak. « Je n’aurais jamais fini leurs livres s’il n’y avait pas l’émission » s’amuse Swann. Le talk-show s’adresse autant à sa communauté, « plus orientée humour, bricolage, feel good », qu’aux écolos chevronné·es, en rendant le débat d’idées autour de l’écologie plus accessible et plus marrant.
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Swann relève avec aisance le périlleux pari du talk-show humoristique. La complicité avec ses invité·es fait plaisir à entendre, les jeux, les blagues grivoises et même des chansons improvisées avec le public se mêlent naturellement aux discussions sur l’énergie, la décroissance ou la justice climatique. L’émission insiste aussi sur les « vies qu’on pourrait avoir », en tentant toujours de soulever les aspects désirables des luttes et de la transition écologique. Voici enfin le grand talk-show que l’écologie mérite.
D’où vient cette idée de lancer une émission entièrement dédiée à l’écologie ?
Ça faisait longtemps que j’en rêvais. Quand j’ai commencé à parler d’écologie sur YouTube, je l’ai fait sous le prisme des gestes individuels. Mais j’avais aussi envie de commencer à parler de militantisme, de changement systémique, du mythe de la croissance, des énergies fossiles qui vont venir à manquer… Mais je ne savais pas comment le faire en étant drôle. C’est beaucoup plus facile de faire des blagues en construisant des toilettes sèches.
Alors je me suis dit qu’au lieu de faire de longues recherches pour comprendre les scientifiques, j’allais plutôt inviter directement des gens qui savent de quoi ils parlent, et moi je me débrouille pour que ce soit drôle, c’est mon métier. Ça me semblait super important de rire de tout ça, parce qu’aujourd’hui c’est limite devenu tabou de parler d’écologie tellement c’est barbant ou déprimant.
Le point de départ de la comédie, ça a toujours été le désespoir, le tragique, les doutes, les humiliations, les mauvaises nouvelles
Le casting des invité·es est très périlleux. Il faut des personnes reconnues dans leur milieu, qui portent des idées fortes, qui soient charismatiques, et qui ne soient pas susceptibles. Ce format les rend plus accessibles, ça les humanise de parler de leurs aspirations, de leur adolescence, de leur sensibilité. Le message passe mieux, et ça montre aux gens que les écolos ne sont pas que des gros rabat-joie qui restent dans la théorie.
Qu’est-ce que ça change d’écrire des vannes sur la catastrophe écologique ? Et de les raconter à côté d’expert·es du sujet ?
Le point de départ de la comédie, ça a toujours été le désespoir, le tragique, les doutes, les humiliations, les mauvaises nouvelles. C’est toujours plus intéressant quand il y a des petites blessures derrière. Si elle est bien racontée, une rupture amoureuse peut me faire hurler de rire. Alors vu comme ça, la crise écologique a un potentiel comique très intense.
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Avec ce format, j’essaye de trouver le juste milieu entre le divertissement et les idées à mettre en valeur, c’est déjà ce que j’essaye de faire avec mes reels Insta. Ça demande plus de travail que d’habitude, pour bien comprendre les enjeux, comprendre qui peut être blessé·e, comprendre que si tu parles de cette branche du féminisme, tu ne parles pas des autres… Et des fois, ça m’arrive d’être aveuglée par la vanne et de passer à côté d’un sujet, par envie de faire rire à tout prix.
Finalement, c’est grâce au rire que tu arrives à trouver ta place dans les luttes pour l’écologie ?
Ma place c’est de toucher et de faire rire les gens
Oui, je me pose beaucoup de questions sur ma place d’artiste dans le monde de demain. Tu vois, le week-end dernier, j’étais à la mobilisation contre la construction de l’A69, entre Toulouse et Castres. J’ai passé le week-end avec Camille Étienne, et je l’ai fait rire alors que c’est lourd et douloureux comme moment. Mais je ne l’ai pas lâchée, j’étais son petit clown. Le bouffon du roi, enfin de la reine de l’écologie. Ça m’a touchée, j’ai eu l’impression de vraiment servir à quelque chose. Parce que ma passion dans la vie c’est d’abord l’humour, ma place c’est de toucher et de faire rire les gens.
Y’a plus de saisons, disponible sur YouTube, en podcast, ou sur la scène du Théâtre de l’Européen, à Paris.