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Pablo Servigne : « Je suis rassuré que tant de jeunes quittent leur job à la con »

par Pioche! Magazine
1 mai 2022
Pablo Servigne ©Vanessa Chambard

Pablo Servigne ©Vanessa Chambard

Nous publions cette semaine deux extraits du livre Basculons ! Cahier militant, « plaidoyer intergénérationnel pour la défense du vivant », sorti le 13 avril chez Actes Sud : un entretien avec Cédric Ringenbach, fondateur de La Fresque du climat, et la tribune de Pablo Servigne, co-fondateur de la collapsologie.

Au fil de Basculons!, les auteurs Tanguy Descamps et Maxime Ollivier, tous deux 25 ans, croisent la route de jeunes qui refusent de participer à un système économique jugé destructeur. Entre ces rencontres, plusieurs personnalités, acteurs et actrices de la transition écologique, posent leur regard sous la forme d’un entretien ou d’une prise de parole libre.

À lire aussi : Basculons ! chez Actes Sud, ou l’alliance nécessaire entre générations militantes

Après les mots de Cédric Ringenbach, ingénieur et fondateur de La Fresque du climat, place à ceux de Pablo Servigne. L’un des principaux théoriciens de la collapsologie, coauteur de plusieurs livres sur le sujet, dont le best-seller Comment tout peut s’effondrer (Seuil, 2015), salue le « désespoir plein d’enthousiasme » d’une jeune génération qui n’entend rien lâcher face aux promesses d’effondrements à venir.

Merci aux auteurs et à Actes Sud de permettre la publication de ces « bonnes feuilles » sur Pioche!.


Chaque fois que j’entends parler de la génération Climat, je suis impressionné par leur détermination et par la rapidité avec laquelle ils et elles intègrent les enjeux, les subtilités et les nouvelles manières de lutter ou de s’organiser.

Je suis rempli de gratitude pour ces jeunes qui se donnent entièrement pour des causes globales, pour des idéaux, pour la vie… et qui renoncent à des destins individuels confortables et tout tracés par leurs parents.

Beaucoup de jeunes que j’ai rencontrés cherchent aujourd’hui du sens, et surtout des liens, de l’authenticité, bref précisément tout ce que n’ont pas su transmettre les deux générations précédentes, braquées sur la reconstruction de l’après-guerre et la croissance économique… et surtout aveugles au fait que toute cette richesse s’est faite au détriment d’autres peuples du monde et de la nature, c’est-à-dire de leurs enfants.

Je suis aussi rassuré que tant de jeunes quittent leur job à la con, leurs boulots vides de sens ou, pire, leurs métiers toxiques…

Ces dernières années, j’ai donné quelques conférences dans des milieux très aisés, avec des chefs d’entreprise, de grands actionnaires, etc. et j’ai vu de près cette fracture intergénérationnelle : dans une même pièce, les parents et les grands-parents (en costard), fiers de transmettre à leur progéniture ce qui était l’essence de leur vie (une immense fortune et un outil de production), semblaient désemparés lorsque leurs enfants tout récemment sortis de l’école de commerce leur faisaient savoir qu’ils ne voulaient plus participer à la destruction du monde. Ils ne voulaient pas accumuler de l’argent, ils voulaient plutôt aider les migrants, “sauver” les forêts, augmenter la résilience alimentaire, améliorer la vie de nos vieux dans les mouroirs, œuvrer pour le bien commun, prendre soin du vivant, prendre soin des gens… Donner du sens à leur vie, quoi ! J’ai vu de près la gêne – très discrète – et l’incompréhension des boomers…

À lire aussi : « Ces jeunes qui s’engagent sont porteurs de tellement d’espoir » – Cédric Ringenbach

Lorsque je vois la génération Climat, je ne peux pas m’empêcher de m’y inclure encore un peu. Je m’y sens bien. Je suis fasciné par cette énergie du désespoir plein d’enthousiasme, par leur discours intelligent, combatif et sensible. Ça me rassure de voir qu’on peut tout à fait être conscient des catastrophes et des risques à venir, tout en s’ancrant dans l’action et l’organisation. C’est ce que j’ai toujours ressenti ! Merci ! Il est donc tout à fait possible d’être catastrophiste et optimiste ! Je ne comprends pas pourquoi tant de personnes ne comprennent pas ça…

Merci, les jeunes ! Vous êtes les résistants d’aujourd’hui ! Quand vous serez vieux, les jeunes vous admireront.

Enfin, moi qui n’ai jamais travaillé pour un patron, pour des actionnaires, pour l’État ou pour une “boîte”, je suis aussi rassuré que tant de jeunes quittent leur job à la con, leurs boulots vides de sens ou, pire, leurs métiers toxiques… pour les humains et la biosphère. Fini les burn-out (dépression du trop de travail), les brown-out (dépression à cause d’un travail trop toxique) et les bore-out (dépression à cause de l’inutilité du job) !

Absolument. Il faut le répéter : il y a de sots métiers ! Tout l’enjeu est d’arriver à trouver le courage de démissionner (idéalement de manière collective et organisée) lorsqu’on se sent une dissonance cognitive. Ne jamais participer, ou cesser de participer. Cesser de collaborer. Désobéir. Exactement comme pour la guerre : si vous n’êtes pas d’accord, il faut refuser de servir. La guerre au vivant ? La guerre aux pauvres ? Idem.

Dans le livre, Hélène dit : “En démissionnant, j’ai décidé que je souhaitais devenir moi-même.” C’est exactement cela. Cela demande du soutien moral et financier, ce qui est plus facile à obtenir dans les familles aisées, mais cela reste un acte de bravoure immense. Devenir qui on doit être, pour protéger la vie, pour prendre soin des autres, c’est maintenant, et c’est une question de vie ou de mort. Merci, les jeunes ! Vous êtes les résistants d’aujourd’hui ! Quand vous serez vieux, les jeunes vous admireront.

Tout comme les personnes qui ont témoigné dans le livre, les bascules importantes de ma vie sont toujours parties d’une intuition profonde, mais ont aussi toujours été stimulées par des rencontres (de personnes et de livres) et nourries par des frissons (en manif ou en action collective). Vous savez, les frissons qui vous font savoir que vous êtes en train de vivre quelque chose qui vous dépasse, quelque chose d’unique, quelque chose de juste.

Qui n’a pas vécu une action de désobéissance ou une manif pour une belle et noble cause ne peut pas comprendre les frissons et la joie du partage, de la coopération, de la fraternité, de la solidarité… qui donnent un sens à une vie.

Bref, on est vraiment dans la merde, mais si c’est avec eux, je veux bien y rester encore un peu.

Extrait de Basculons ! Cahier militant, sorti le 13 avril chez Actes Sud.

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Tags : CitoyennetéLittératurePolitiqueRéflexion

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