Basculons ! Cahier militant sort ce mercredi 13 avril aux éditions Actes Sud. L‘ouvrage se veut être « un plaidoyer intergénérationnel pour la défense du vivant ». Nous avons rencontré l’un des deux auteurs, Tanguy Descamps.
À la suite de leur prise de conscience de l’urgence écologique, Tanguy Descamps et Maxime Ollivier, tous deux 25 ans, ont croisé la route de nombreux jeunes en pleine bascule. Ayant, pour la plupart d‘entre eux, eu l‘occasion de faire des études supérieures, ils refusent pourtant de jouer le jeu d’un système économique destructeur.
Pendant deux ans, Tanguy et Maxime ont récolté les témoignages d’une trentaine d’entre eux, âgés de 18 à 30 ans. Ces femmes et ces hommes y racontent leurs doutes, leurs indignations, et les révoltes qui en ont découlé. À leurs histoires, se nouent les textes de dix-sept acteurs et actrices des transitions, dont Pablo Servigne ou Delphine Batho. Plus âgés, engagés dans ces combats écologiques depuis plusieurs décennies, ils portent leurs regards sur cette “génération bascule” et revisitent leurs propres parcours de “défricheurs de l’écologie”.
L‘objectif de cet ouvrage est simple et ambitieux : donner confiance à ceux qui se sentent seuls et impuissants dans leur bascule, aider à ouvrir la discussion entre générations, et, surtout, inciter à l‘engagement.
Comment est né Basculons ! ?
Tanguy Descamps : Avec Maxime, nous nous sommes rencontrés à La Bascule (association crée en 2019 par l‘entrepreneur Maxime de Rostolan pour participer à la transition écologique, ndlr.). On s‘est aperçu qu‘on était nombreuses et nombreux à vouloir que les choses changent et à agir dans cette direction, alors on a eu envie de mener une bataille culturelle pour rendre visible ces parcours, et donner envie à d‘autres de faire comme nous.
Pour vous, qu‘est-ce qu‘une bascule ?
« Je me suis rendu compte que la croissance infinie était un mythe, c‘est ce qui a enclenché ma bascule. »
Il y a plein de manières de vivre sa bascule, et c‘est justement ce que nous voulons raconter. Dans mon cas, c‘est un livre que j‘ai lu dans le cadre de mon mémoire de master en management, La guerre des métaux rares – La face cachée de la transition énergétique et numérique (de Guillaume Pitron, éd. Les Liens qui Libèrent, 2018 ndlr.). Je me suis rendu compte que la croissance infinie était un mythe, qu‘il n‘y aurait pas de solution purement technologique à la crise écologique que nous traversons. C‘est ce qui a enclenché ma bascule, mais pour d‘autres, ça a pu être la démission de Nicolas Hulot, ou Demain, le film de Cyril Dion. C’est parfois quelque chose de moins clair, une émotion, une intuition viscérale, comme en témoignent certains dans notre livre.
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En plus des 30 jeunes qui racontent leur bascule, votre livre contient des témoignages de personnalités plus âgées. Pourquoi ce choix de mêler les générations ?
« Si nous sommes là,
c‘est notamment grâce à ceux
qui avant nous ont prêché dans le désert. »
On oppose souvent les tranches d‘âge lorsqu‘on parle d‘enjeux écologiques, comme s‘il y a avait d‘un côté la génération climat et de l‘autre les boomers. Or, si nous sommes là, c‘est notamment grâce à ceux qui avant nous ont prêché dans le désert. Outre la nécessité de leur rendre hommage, il y a celle, stratégiquement, de faire alliance. Nos parents, nos grands-parents, ce sont aussi et surtout eux qui votent, il y a un réel enjeu à dialoguer, les faire participer à la bascule. Il faut que les générations se parlent et trouvent un point d‘entente, sans pour autant transiger sur la radicalité et céder au greenwashing. Mais il faut trouver un moyen, ensemble, d‘être à la hauteur de ces défis qui nous concernent tous.
Dans le contexte actuel, notamment à la lecture du dernier rapport du GIEC, il y a de quoi se décourager. Qu‘auriez-vous envie de dire à celles et ceux qui souhaitent agir mais se disent qu‘il est déjà trop tard ?
Déjà, qu‘il n‘est jamais trop tard pour éviter le pire. Le constat du GIEC est sans appel, il est déjà trop tard pour éviter certaines transformations irréversibles de la planète et du vivant. Mais on peut toujours agir pour ne pas empirer la situation. Et même, y trouver de la joie. Dans l‘engagement collectif, même si on a pas la naïveté de croire qu‘on pourra tout changer, le simple fait d‘essayer, collectivement, de créer des liens et de ne pas rester passif, c‘est une manière de se réautoriser à rêver.
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Qu’espérez-vous de la sortie de Basculons ! et de sa lecture ?
Nous espérons occuper une place, participer à cette bataille culturelle. Si nous arrivons à créer du dialogue, nous aurons réussi quelque chose. A minima, apporter un peu de nourriture, de renouveau, d‘espoir et de réconfort à celles et ceux qui militent déjà. Et si nous parvenons à créer un effet boule-de-neige, inciter d‘autres à la bascule, alors on pourra être satisfait. On a d‘ailleurs créé une plateforme dédiée aux récits de bascule, on espère recevoir de nombreux témoignages et en faire quelque chose, pourquoi pas des vidéos.
Commander Basculons ! Cahier militant, de Tanguy Descamps et Maxime Ollivier, Éditions Actes Sud, parution le 13 avril 2022.
Retrouver l’ensemble des événements et rencontres avec les auteurs sur la plateforme dédiée.