Encouragés par les rapports du GIEC et la société civile, les médias ont progressivement pris conscience de leur responsabilité face à l’urgence écologique. Au sein des rédactions, des réflexions, des formations et des chartes apparaissent, faisant progressivement évoluer la couverture médiatique des enjeux climatiques et environnementaux. En interrogeant des dizaines de journalistes, le collectif Pour un réveil écologique a documenté les efforts déployés par les médias en ce sens. Toutefois, un adjectif revient très régulièrement dans le rapport, pouvant presque le résumer : « insuffisant ».
« Les médias qui nous ont répondu considèrent à l’unanimité qu’un de leurs objectifs est de contribuer à l’émergence d’une société́ écologiquement soutenable. » Le dernier rapport du collectif Pour un réveil écologique dédié à la couverture médiatique des enjeux écologiques s’ouvre sur une bonne nouvelle… nuancée moins d’une ligne plus tard : « Pourtant, notre étude traduit l’insuffisante prise en compte des enjeux écologiques dans le traitement de l’actualité ».
Dans son rapport « La transition écologique a-t-elle bonne presse dans les médias ? », le collectif part d’une enquête auprès de 14 rédactions volontaires, dont TF1, Le Monde, Le Figaro, France TV ou encore Canal +, pour dresser un état des lieux de l’évolution des médias face à l’urgence écologique. Les résultats mettent en lumière les efforts effectués depuis quelques années, avant de pointer les principales limites qui empêchent les rédactions d’aller plus loin.
Intégrer le prisme écologique à tous les sujets
Principal reproche : les enjeux écologiques restent trop souvent cantonnés à une rubrique dédiée et à des journalistes spécialisés. Si le rapport reconnaît la nécessité vitale de traiter ces enjeux de manière précise, il affirme que le défi est désormais qu’ils « irriguent de façon transversale l’ensemble du traitement de l’actualité́ ».
Mais une telle injonction se heurte au fonctionnement « en silo » des rédactions. Pour un réveil écologique préconise alors une mesure simple : compter, au sein de chaque rubrique, la part des articles ou émissions qui évoquent les enjeux écologiques, comme le fait déjà la rédaction de La Croix. Et dans cette comptabilité, séparer les enjeux climatiques des autres enjeux environnementaux comme la biodiversité ou la pollution des sols par exemple. Une manière de s’assurer que de la rubrique Culture, à la rubrique International en passant par l’Économie, aucune des limites planétaires ne soit oubliée.
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La formation des journalistes est aussi décrite comme incontournable pour intégrer le prisme écologique à l’ensemble des sujets. Excepté Canal + et La Tribune, toutes les rédactions témoignent d’efforts en ce sens, mais s’arrêtent trop souvent à un atelier Fresque du climat. Le rapport incite alors les rédactions à s’inspirer de RFI et France 24 qui ont fait suivre à leurs journalistes une formation de trois jours sur les enjeux écologiques, dispensée par le média Vert, à l’origine de la Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence environnementale.
La publicité : point noir de l’engagement des médias
Les médias déclarent aussi être engagés dans des stratégies de réduction de l’empreinte écologique de leurs pratiques, en restant attentifs à la consommation énergétique des bâtiments, aux modes de déplacement professionnels ou au bilan carbone du numérique. Toutefois, Pour un réveil écologique pointe un angle mort de ces efforts : la publicité.
« Cela ne sert pas à grand chose d’aller faire des interviews à vélo si l’article qui en ressort vante les mérites d’une entreprise basée sur la vente de SUV, ou pour vendre des encarts publicitaires au bénéfice desdits SUV. » En rappelant ainsi les ordres de grandeur, le rapport insiste sur la responsabilité des médias dans la promotion de produits jugés « écologiquement insoutenables ».
Car à ce jour, aucun média interrogé n’envisage de limiter sa publicité à des critères environnementaux. Le collectif propose alors aux rédactions de quantifier l’impact carbone découlant de la promotion des produits dans les espaces publicitaires et d’intégrer cette donnée au bilan carbone des rédactions. La mesure permettrait de faire entrer la publicité dans la stratégie écologique des médias.