Selon une équipe de recherche suisse, les principaux médias favorisent les sciences naturelles et les projections à long-terme pour parler du réchauffement climatique. Des choix éditoriaux qui encouragent « le déni et l’évitement » en éclipsant les sciences sociales, politiques et technologiques plus enclines à mobiliser les citoyen·nes et à apporter des pistes d’actions.
« Les médias montrent une facette étroite et limitée de la connaissance sur le changement climatique ». Cinq chercheur·euses de l’université de Lausanne ont étudié les inégalités de médiatisation entre les recherches sur le changement climatique. Dans un article intitulé « Les recherches en une des journaux sont-elles à la mesure du challenge ? », ils et elles dressent un constat ferme : les choix éditoriaux favorisent « le déni et l’évitement » et freinent l’avènement des changements sociétaux permettant de faire face à la catastrophe climatique.
À lire aussi : Déconnecté·es, hystériques, terroristes : comment les médias décrivent-ils les activistes écolos ?
En 2020, parmi les 50 000 articles publiés sur le réchauffement climatique, la majorité des 100 plus médiatisés proviennent des sciences naturelles. Ils traitent de projections à long terme ou de problématiques précises comme la fonte des glaciers ou la disparition des ours polaires. Bien que ces approches soient nécessaires, leur sur-représentation contribue à confiner la science au « rôle de lanceur d’alerte sur les conséquences du réchauffement climatique pour les composants du système-terre, à grande échelle et à long-terme ».
Pour les auteur·ices de l’étude, une telle couverture médiatique pousse les citoyen·nes à se détourner du sujet, pour éviter de se confronter à une « vérité inconfortable ». Cela les encourage aussi à conserver une distance émotionnelle et psychologique avec le sujet, présenté comme un enjeu global et lointain dans le temps. Cela contribue à « renforcer les barrières entre action et information » tranche l’étude.
Pourtant, de nombreux champs scientifiques se concentrent sur les dimensions locales, quotidiennes et politiques de la catastrophe climatique qui sont plus enclines à mobiliser et à interpeller. C’est le cas des sciences sociales, économiques ou technologiques qui proposent des grilles de lecture et des solutions dont les citoyen·nes peuvent se saisir. Ce sont pourtant les grandes perdantes des conférences de rédaction. Ainsi, les sciences humaines représentent moins de 1% des articles relayés dans les médias. L’étude propose alors de réadapter les critères éditoriaux sur le sujet, en privilégiant les approches qui présentent les effets concrets du réchauffement climatique, mettant à distance la peur et l’inquiétude au profit de « comportements pro-environnementaux ».