Le public est demandeur de festivals plus écolos, mais une telle transformation coûte cher pour des événements aux caisses souvent vides. Un premier pas dans la bonne direction a été effectué, avec la mise en place d’une Charte de développement durable pour les festivals, qui permet l’octroi d’aides spécifiques aux festivals qui verdissent leur organisation, selon Rudy Guilhem-Ducléon, du Collectif des Festivals. Il participera à une table ronde sur le sujet dans le cadre de la Paris Electronic Week le jeudi 22 septembre à 15h30.
83% des festivalier·es s’attendent à ce que les événements qu’ils/elles fréquentent réduisent leur impact environnemental, selon une étude du groupement de festivals anglais Powerful Thinking. Mais une telle transformation nécessite énormément de temps, de personnel et d’argent. Trois éléments dont les festivals manquent souvent cruellement.
Rudy Guilhem-Ducléon connaît bien ce paradoxe. Ce spécialiste du management environnemental appliqué aux événements travaille sur ces questions au sein du Collectif des Festivals. Ce groupement rassemble 32 festivals de toutes les tailles, qui ont lieu en Bretagne, tels que le festival interceltique de Lorient, les Trans Musicales de Rennes, ou bien Astropolis à Brest. Rudy et ses collègues les accompagnent dans leur quotidien, en prodiguant conseils, formations et accompagnement administratif. Le Collectif des Festivals effectue également des travaux de recherche-action en partenariat avec d’autres structures culturelles régionales ou nationales.
Il participera à une table ronde consacrée aux aides disponibles pour les festivals écolos, durant la Paris Electronic Week le jeudi 22 septembre à 15h30. Il y présentera un retour d’expérience des festivals adhérents au collectif, autour des premières aides mises en place à l’échelle nationales sur le sujet. Cette année, la Paris Electronic Week aura lieu au parc de la Villette, qui accueillera rencontres et concerts. Pioche! est partenaire de l’événement et organise un cycle de conférences sur les liens entre musique et écologie.
À quel type d’aides peuvent prétendre les festivals qui font ou souhaitent faire des efforts pour améliorer leur bilan carbone ?
Rudy Guilhem-Ducléon : Il existe depuis quelques mois de nouvelles aides, mais il est difficile de savoir lesquelles ils pourront toucher. Il y a également quelques dispositifs locaux, proposés par les communes, régions et départements. Des organismes plus originaux comme les syndicats de gestion des déchets peuvent soutenir des projets précis sur leur champ d’action, par exemple.
Au niveau national, le Centre national de la musique prévoit une aide aux projets en faveur de la transition écologique qui n’est pas spécifique aux festivals. Elle peut couvrir jusqu’à 40% du coût du projet. Ce qui a fait beaucoup de bruit dernièrement, c’est la Charte du développement durable pour les festivals. Elle a été éditée début 2022, après un travail de concertation entre le ministère de la Culture et les principaux acteurs intéressés. Elle prévoit notamment le versement d’aides conditionnées au respect de l’environnement.
Qu’est-ce que ce document apporte de nouveau ?
C’est un document très intéressant dans la méthode car il propose d’appliquer à tous les festivals des méthodes de management environnemental qui ont déjà fait leurs preuves. La charte préconise de faire un diagnostic qui va déterminer les points les plus significatifs, avant de monter un plan d’action qui découle de ces éléments. C’est une méthodologie qui jusque-là était propre aux événements engagés et qu’on applique désormais à tous les festivals, et c’est vraiment positif.
À lire aussi : « Pour faire sa transition écologique, le monde de la culture doit accepter de ralentir »
Si les objectifs sont bien respectés, ils peuvent transformer fondamentalement l’organisation des festivals. On parle d’éléments très concrets comme l’alimentation, la gestion des déchets ou bien les transports.
Comment est-ce que la charte a été reçue par le monde des festivals ?
Plutôt bien. Les festivals qui adhèrent au collectif sont plutôt heureux de voir ces enjeux remonter, même si c’est un peu tard. Beaucoup sont déjà en phase avec les dix objectifs, mais trouvent tout de même intéressant de retrouver autant de pistes rassemblées dans un document unique. Cela permet aux festivals qui ne maîtrisent pas encore ces questions de se lancer sereinement, sans partir de zéro. Le document prévoit 10 objectifs, dont seulement 3 sont obligatoires. Ils peuvent donc piocher parmi ceux qui leurs sont accessibles, en fonction de leurs problématiques propres.
Est-ce que l’on peut imaginer que ces aides financières seront suffisantes pour pousser les festivals à faire leur transition écologique, ou bien faudra-t-il passer par d’autres dispositifs ?
Les aides sont une incitation efficace pour changer le mode de fonctionnement des festivals. Mais ce n’est pas une solution miracle. Il faut également les aider à mettre en place concrètement ces changements. Tout le monde ne peut pas se permettre d’engager un référent RSE, même à temps partiel. Les pouvoirs publics ont aussi leurs rôles à jouer à l’échelle locale. Ils peuvent par exemple développer des réseaux de transports propres, permettant de réduire le bilan carbone des événements. Les terrains mis à disposition sont souvent peu ou pas approvisionnés en énergie, obligeant les festivals à recourir à des groupes électrogènes.
Les pouvoirs publics ont aussi leurs rôles à jouer à l’échelle locale
Aider les festivals à devenir plus écolos, ce n’est donc pas qu’une question d’argent. On ne peut pas travailler sur des solutions préconçues. Il faut s’adapter aux besoins de chaque événement et cela demande donc une expertise et de l’accompagnement. Toutes les régions ne sont pas pourvues de réseau d’accompagnement des festivals à l’éco-responsabilité comme le nôtre, il y a encore quelques trous dans la raquette.
Toutes les informations concernant la Paris Electronic Week sont à retrouver sur le site de l’événement.