Dans une tribune, 81 jeunes entreprises textiles « made in France » souhaitent un meilleur équilibre entre les marques vertueuses pour l’environnement et l’industrie de la fast fashion. Face à l’urgence climatique, 1083, Asphalte, Au Juste, Hopaal, Loom, Picture ou WeDressFair demandent l’indexation de l’éco-contribution des vêtements sur leurs émissions de gaz à effet de serre.
« Plus une entreprise pollue, moins sa production lui coûte cher et plus elle est compétitive. » Alors que les soldes d’été font de nouveau le plein, ce constat fait par 81 marques textiles françaises (dont 1083, Asphalte, au Juste, Hopaal, Loom, Picture ou WeDressFair), dans une tribune parue aujourd’hui par Le Monde, est sans appel. C’est un fait, la délocalisation de l’industrie de l’habillement dans des pays à bas salaire et à l’énergie fortement carbonnée (charbon, gaz) permet aux grandes marques textiles de réduire toujours davantage leurs coûts, et donc leurs prix, au grand dam de la planète.
La nouvelle tendance ? La « real-time fashion », symbolisée par la marque chinoise Shein, propose des prix à l’achat et un renouvellement des collections proche de l’absurde : une collection par jour, plus de 1 000 nouveaux produits quotidiens, des jeans à 8€ ou des t-shirts à moins de 2€, comme l’ont repéré nos confrères de Climax. « Il y a aujourd’hui un avantage économique à produire de manière irresponsable. Une “prime au vice” que nous dénonçons » écrivent aujourd’hui les chefs et cheffes d’entreprises de l’habillement français, soutenus par 34 acteurs du secteur textile (France Terre Textile, La Caserne, SloWeAre….).
Pour une concurrence « non-faussée et vertueuse »
Relocalisation, petites collections, précommandes ou abandon des soldes… Vertueux, le modèle de ces jeunes marques de mode « made in France » a pourtant bien du mal à concurrencer l’offre de la mode jetable. « L’éthique pèse bien peu face à des prix cassés et des collections toujours plus vite renouvelées. Pour un Patagonia, combien de Primark, Boohoo, Forever 21, H&M ou de Zara ? »
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Il n’est pas courant que des entreprises demandent à ce qu’on les régule. Mais devant l’urgence environnementale, nous n’avons plus le choix.
Selon l’Ademe, l’industrie textile dégage 1,2 milliard de tonnes de gaz à effet de serre par an (environ 2% des émissions), soit plus que les vols internationaux et le trafic maritime réunis. Face à l’urgence climatique, les signataires demandent à « renverser cadre règlementaire ». « Nous demandons, nous jeunes marques textiles, que la loi oblige les entreprises de l’habillement, les nôtres y compris, à payer réellement les coûts environnementaux qu’elles génèrent. »
Ces derniers souhaitent augmenter fortement l’éco-contribution des vêtements (aujourd’hui à 0,06€ par produit) « afin qu’elle soit vraiment incitative », en l’indexant sur leurs émissions de gaz à effet de serre. Ils demandent aussi que soient pénalisées « les stratégies de forte incitation à la consommation ». « En 2025, il faut que l’éco-contribution atteigne 5€ pour les marques ayant les plus mauvaises pratiques. Elle doit prendre en compte le renouvellement rapide des collections, les promotions systématiques ou le greenwashing avéré. »
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« Nous essayons de faire notre part dans la lutte contre le changement climatique, mais nous constatons que nos efforts sont sans effet, si toutes les entreprises qui vendent des vêtements en France ne s’impliquent pas à la même hauteur » écrivent encore les signataires. « Il n’est pas courant que des entreprises demandent à ce qu’on les régule. Mais devant l’urgence environnementale, nous n’avons plus le choix. (…) Si des règles justes s’appliquent à toutes, c’est l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre de notre secteur qui pourra diminuer, sans sacrifier la santé économique des entreprises les plus vertueuses. » L’appel est lancé, alors que d’ici quelques mois seront revus les critères de calcul de l’éco-contribution dans l’habillement.
Marques signataires (liste non exhaustive) :
1083, 1987, Anaik, Anaod, Anarres – Le T-shirt français, Asphalte, Atelier Julia Roulez, Atelier Loden, Atelier Unes, Au juste, BALT, Basanne, Blaune, Bombo, Caur, Cèucle, Chaussettes Orphelines, CielTextile, Circle Sportswear, Dalangeac, élémentaire, Eunoia Paris, Fit Marguerite, Good Fabric, Heiss, Héro, Hopaal, Jena Kurves, Jules et Jenn, Kitsoo, L’Unique Façon, La green session, La mode plus juste, La Tête dans les Nuages, La Toile d’Avion, La vie est Belt, La Virgule, Laines paysannes, Lautrec, Le chemiseur, Lee Le Prunennec, Les Optimistes, Les tendances d’emma, Lolo Paris, Loom, Madeleine et Marie, Maille à part, Manufacture, Maratona, Marigance, Meïla, Mont chat Michel, Muudana, Ngo Shoes, Nolwenn Faligot, Nomads Surfing, noyoco, Olly Lingerie, Panorama, Patine, Paullet, Peau-Ethique, Picture Organic Clothing, Piõka Éco Surf Culture, Pitumarka, Primitif, Roxane Baines, Sarah Madeleine Bru, Second Sew , Soubacq, Soulyé, Ubac, Valet de Pique, Violaine paris, WeCo Store, WeDressFair, Wersatile Equestrian, YCCA, YSatys.
Acteurs du secteur textile qui soutiennent l’initiative :
3D-TEX, Accroche-com’, AGL Conseil, AIR coop, Amaury Poudray, Bugis SAS, carolinefayon, Collectif Emergence, CrushON, Ecoeff lab, Elise Lucas Design, Élodie Alain, En création, Entada Textile, France Terre Textile, Glamclemencecouture, L’École de la Maille de Paris, La Caserne, la dame qui pique, Lelabplus, Lemahieu, Ligne, Livetrend, Marie-Eve Nardou, Marina coutelan, Marion de Castilla – Studio sur-mesure, Nouveau Modèle Podcast, Oceane Joncoux, Qeety, SloWeAre, Sondès Louati Jarraya SAS, Tekyn, VVC.