Protéger les bruits et odeurs de la campagne ? Si l’idée peut paraître saugrenue, il s’agit bel et bien de l’objet d’une loi promulguée le 29 janvier dernier. Concrètement, le patrimoine sensoriel rural ne peut plus être la cause de plainte pour « troubles anormaux du voisinage ».
Laissez les cigales chanter ! Depuis le 29 janvier, la loi protège le patrimoine sensoriel de la campagne. Visiblement agacé de voir les maires de France de plus en plus pris à partie dans des conflits de voisinage, entre coq trop bruyant et crottin malodorant, le Parlement a fini par légiférer. Les sons et odeurs caractérisant les espaces naturels entrent désormais dans le code de l’environnement. Ces « bruits et effluves » ne pourront plus être la cause de plaintes pour « troubles anormaux du voisinage ».
C’est franchement rude d’être réveillé à 7 heures du matin alors que nous sommes en congés
Cette loi confie également aux services régionaux de l’inventaire du patrimoine le soin d’identifier et de qualifier l’identité culturelle des territoires ruraux, y compris leurs éléments sonores et olfactifs, pour « contribuer à les valoriser » mais surtout créer « une carte d’identité des territoires ruraux », arme ultime pour désamorcer les conflits de voisinage.
À travers cette loi, le législateur poursuit deux objectifs : « reconnaître la valeur intrinsèque de notre patrimoine rural et de son authenticité, en protégeant un mode de vie » et « lutter contre les contentieux de voisinage portés par les personnes qui s’installent à la campagne sans en accepter les caractéristiques intrinsèques ».
L’exemple des Bondons en Lozère
Ces dernières années, les bruits et odeurs de la campagne ont parfois été au centre d’affaires qui, au mieux, font sourire. En 2018, le maire du petit village des Bondons en Lozère a reçu un courrier d’une vacancière présente dans la commune. L’objet de la lettre ? « Que l’horaire de sonnerie de la cloche du presbytère puisse être décalée car c’est franchement rude d’être réveillés tous les matins à 7 heures alors que nous sommes en congés. »
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En novembre 2019, un éleveur de Lacapelle-Viescamp, dans le Cantal, a été condamné à verser 8 000 euros à ses voisins pour nuisances olfactives. Enfin, dans le Haut-Rhin, le cheval de trait Sésame a été contraint, après six ans de procédure, d’aller paître ailleurs car le crottin incommodait les voisins.
Entre sourire et scepticisme
Dans une tribune publiée par la fondation Good Planet, Creezy Courtoy, présidente d’International Perfume Foundation, s’interroge sur la finalité de ce texte de loi et sa portée réelle. « Dans quel monde vivons-nous ? Avons-nous oublié les bruits, les sons et les odeurs de la campagne ? Ou alors ne les connaissons-nous pas, voire n’avons-nous même pas l’idée qu’ils existent ? », interroge-t-elle.
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