Les enjeux écologiques placent le monde du spectacle vivant face à certains arbitrages difficiles. Dans un secteur habitué à multiplier les initiatives collectives, la coopération semble s’imposer comme le moteur d’une transformation profonde et vertueuse. Toutefois, les contours d’une gouvernance efficace et véritablement démocratique de la transition écologique restent à inventer.
La « gouvernance de la transition écologique » est l’une des thématiques au cœur de la programmation de l’espace Développement Durable des Biennales internationales du spectacle (BIS), les 17 et 18 janvier 2024 à Nantes, dont Pioche! est partenaire.
Le monde de la culture sait se regrouper en de multiples réseaux, collectifs et autres associations, dépassant opportunément les logiques concurrentielles. Et si cet esprit de coopération, renforcé depuis la pandémie de Covid-19, pouvait devenir un atout de taille pour s’adapter face à l’urgence écologique ? Ce sera là l’un des fils rouges de l’espace développement durable des Biennales internationales du spectacle (BIS), qui fêteront leurs 20 ans à Nantes ces 17 et 18 janvier 2024.
Devenues incontournables dans le secteur du spectacle vivant depuis leur création, les BIS accueillent aujourd’hui près de 15 000 professionnel·les de la musique, de la danse, du théâtre ou du cirque, venu·es se pencher sur l’avenir du secteur. Et en particulier sa transition écologique, qui prend place dans le désormais attendu espace développement durable (« l’espace DD »). On y discutera, entre autres, des enjeux de gouvernance, dans un contexte où les initiatives vertueuses se multiplient, et où il semble plus que jamais nécessaire de s’assurer que les bonnes idées, comme les décisions, soient partagées par tous·tes.
Coopérer pour mieux changer
La programmation fait ainsi bonne place au partage d’expériences et à l’observation de ce qui se fait ailleurs. C’est tout le sens de la masterclass du Théâtre national de Strasbourg programmée à l’espace DD des Biennales (17 janvier, 13h50) et de la keynote du ténor Sébastien Guèze qui reviendra sur trois ans d’expérimentation au service de la transition de l’Opéra (18 janvier, 12h20). Par où commencer ? Est-il possible de s’adapter sans impacter l’emploi et son rayonnement culturel ? Les interventions visent à détailler les processus de transition, pour aborder frontalement les questions qui s’imposent à la plupart des structures culturelles.
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Réduire l’empreinte carbone du spectacle vivant, cela passe aussi par l’expérimentation de nouvelles pratiques construites en commun. L’espace DD se donne alors comme un cadre privilégié pour apprendre à « coopérer pour changer en profondeur les modes de production culturelle » (18 janvier, 9h50), en s’appuyant sur les projets existants. On retrouvera notamment l’équipe de Cooprog, une plateforme gratuite et en open source qui permet aux programmateur·ices de concevoir des tournées géographiquement et temporellement cohérentes (18 janvier, à 15h40).
Dans le monde du jazz, la coopération entre 11 acteur·ices européen·nes a donné lieu au projet Better Live destiné à améliorer la mobilité des artistes en Europe… tout en réduisant l’empreinte carbone des tournées (à découvrir le 17 janvier, à 15h55). Côté théâtre et musiques actuelles, des référentiels carbone naissent de la mise en commun des bonnes volontés (et des moyens), et ouvrent la porte à la décarbonation de toutes les salles de spectacle (une rencontre animée par Pioche!, le 17 janvier à 16h).
Qui fait quoi ?
« Il y a encore trois ans, la décroissance était complètement taboue, alors qu’aujourd’hui elle revient quasi systématiquement dans les discussions sur le sujet », expliquait à Pioche! Lucie Bouchet, programmatrice de l’espace DD. Pour prolonger – et incarner – la question, un débat mouvant aura lieu, le 17 janvier à 18h35, sur le thème « Faut-il produire moins de spectacles pour répondre aux exigences de sobriété énergétique ? » (17 janvier, 18h35). L’occasion de laisser s’exprimer ses réflexions, dilemmes et craintes sur le sujet, tout en se dégourdissant les jambes.
Le lendemain, une quinzaine de réseaux, de fédérations et de syndicats du spectacle vivant présenteront leur feuille de route, élaborée en 2023, pour accélérer la transformation à l’échelle du secteur. Le mot d’ordre : si les acteur·ices du terrain se sont mis en marche, ils et elles ont désormais besoin de l’appui de la puissance publique pour aller plus loin.
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Et comment aller plus loin ? Comment les institutions publiques peuvent-elles aider à accélérer le mouvement ? Voici peut-être l’une des interrogations qui jalonneront les échanges nantais, et qui seront mises en lumière le 17 janvier à 14h35, lors de la rencontre entre sept structures différentes (association, syndicat, Centre national de la musique, théâtre…) autour du thème « Quelle place pour chacun·e dans la transformation écologique ? ».
Et le public ? Souvent oublié des discussions, comment perçoit-il l’impact environnemental et social des concerts et festivals ? (18 janvier, 14h50). Car loin de n’être qu’un débat entre professionnel·les, la transition de la culture concerne tout autant celles et ceux qui viennent aux spectacles. Ces expérimentations ne sauraient se passer d’un processus démocratique, indispensable pour inspirer ailleurs la voie vers une transformation volontaire, à la hauteur des enjeux écologiques et basée sur la coopération.
Pour prolonger la discussion, rendez-vous aux Biennales internationales du spectacle, les 17 et 18 janvier 2024 à Nantes. Retrouvez les 50 rencontres de l’espace DD par ici.