La pollution lumineuse, aussi dangereuse pour l’environnement que le réchauffement climatique ? C’est l’une des conclusions d’une étude parue dans la revue scientifique Nature, ecology and evolution, le 2 novembre. Des chercheurs estiment en effet que les lumières artificielles bouleversent durablement la faune et la flore.
La pollution lumineuse, qu’est-ce c’est ? Pour faire simple, il s’agit de toute la lumière superflue que l’humain produit la nuit. Lampadaires, enseignes lumineuses ou encore phares de voitures… Aujourd’hui, près d’un quart de la planète est éclairée en permanence, et cette surface augmente de 2% chaque année. En France, la quantité de lumière émise par le seul éclairage public la nuit a augmenté de 94% entre 1992 et 2012, selon l’Association nationale pour la protection du ciel et de l’environnement nocturne. Sur la même période, le nombre de points lumineux d’éclairage public a bondi de 89%.
Près d’un quart de la planète est éclairée en permanence
Selon les scientifiques, ce phénomène affecte la vie sauvage de manière extrêmement néfaste. La pollution lumineuse réduit notamment la pollinisation et perturbe les déplacements des oiseaux ou encore des tortues. Par ailleurs, chez toutes les espèces animales observées, les scientifiques ont remarqués des niveaux réduits de mélatonine, cet hormone qui régule les cycles du sommeil.
Les rongeurs chassent moins longtemps, les oiseaux chantent plus tôt
Autre observation : la pollution lumineuse a des conséquences sur le comportement de certains animaux nocturnes et diurnes. Les rongeurs, qui se nourrissent principalement la nuit, sont actifs pendant une durée plus courte, alors que les oiseaux commencent à chanter plus tôt. Par ailleurs, certaines espèces sont attirées par la lumière artificielle : « les insectes sont attirées par les lampadaires. C’est ce qu’on appelle un puit écologique : ces animaux sont attirés là où ils vont mourrir », explique au Monde Romain Sordello, expert en pollution lumineuse et coordinateur de cellule à l’Office français de la biodiversité.
79% des Français favorables à la réduction de l’éclairage public
« Ce qui ressort, c’est l’ampleur des effets. Des incidences ont été constatées partout : microbes, invertébrés, animaux et plantes », a déclaré Kevin Gaston, auteur principal de l’étude, au Guardian. Il demande aux gouvernements, aux entreprises mais aussi aux particuliers d’être plus rigoureux : « Aujourd’hui, nous voyons l’éclairage comme quelque chose qu’on installe dehors sans trop y penser. Nous devons plutôt nous en servir uniquement lorsque nous en avons besoin. »
Un enjeu d’intérêt général
La pollution lumineuse est désormais un enjeu d’intérêt général. 79% des Français se disent favorables à la réduction de la durée d’éclairage public, contre 48% en 2012, selon un sondage OpinionWay pour l’Anpcen, réalisé en 2018. Et cette tendance, couplée au confinement, a poussé certains élus locaux à ordonner l’extinction des feux. « Le confinement a été un déclencheur dans beaucoup de communes », déclare Loïc Girard, élu à la municipalité de Semur-en-Auxois (Côte d’or), à France 3. La commune bourguignonne a ainsi décidé de couper une partie de l’éclairage public dans le centre-ville et sur les axes traversants. Des initiatives similaires ont été observées ces derniers jours aux quatre coins de la France, comme à Écuisses (Saône-et-Loire), Riantec (Morbihan), Apt (Vaucluse) ou encore à La Souterraine (Creuse).
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