En Île-de-France et dans plusieurs villes d’Europe, le festival Kiosquorama redonne vie aux kiosques à musique avec des concerts gratuits et un village éco-citoyen. Un modèle original permettant de renouer avec l’esprit originel de ce mobilier urbain iconique, tout en replaçant la musique au cœur de la ville.
Héritages de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, les kiosques à musique font partie du paysage urbain. Ces pavillons ouverts aux quatre vents, installés dans les parcs et sur les places publiques, ont été pensés pour accueillir les fanfares militaires et les Société d’éducation musicale populaire, au service d’un idéal de démocratisation de la musique.
Depuis 2007, le festival Kiosquorama propose de redonner vie à ces espaces publics. À Paris, Bruxelles, Lisbonne, Madrid, Milan ou Prague, il invite des artistes émergent·es à monter sur ces scènes atypiques, le temps de concerts gratuits et ouverts à tous·tes. Et fidèle à son identité de « festival à impact », à chaque date un village éco-citoyen fait découvrir aux habitant·es les belles initiatives de leur quartier (friperie, association solidaire…).
Cette année, Kiosquorama revient dans les parcs de Paris et de Taverny (95) les week-ends du mois de septembre, avec à l’affiche Marco Ferreira, Bobbie, Jann Beaudry, Morgane Imbeaud, Tianmi, Théo Nost et Louise Combier. Zoom sur ce festival itinérant au modèle original, au service du vivre-ensemble et de la diversité artistique.
« Se déplacer là où vivent les gens »
« L’esprit du festival, c’est de se déplacer là où vivent les gens » explique Frantz Steinbach, cofondateur du festival. Avec Kiosquorama, ce sont les artistes qui viennent au public, en pleine journée, permettant de faire tomber la barrière symbolique parfois associée aux lieux de culture. « Le kiosque a un côté familier, rassurant, on vient jouer à côté quand on est petit·e, on s’y donne rendez-vous quand on est ado… »
À lire aussi : Le Centre national de la musique imagine quatre scénarios vers une musique zéro carbone
Avant chaque édition, les organisateur·ices concentrent leurs efforts sur une communication ultra-locale, en s’associant avec des structures du territoire qui s’adressent à des personnes éloignés des réseaux culturels traditionnels. L’événement draine ainsi des publics variés, informé·es en amont ou arrivé·es au détour d’une promenade, donnant vie à une ambiance spontanée dont les artistes sont souvent friand·es.
« Les plus beaux moments de Kiosquorama sont dans le regard des enfants : quand les artistes montent sur scène et qu’ils/elles découvrent parfois pour la première fois une guitare, un micro et un concert », raconte Chloé Bihan, coordinatrice du festival.
Au service de l’émergence
Côté programmation, le festival itinérant s’engage pour l’émergence artistique. En 17 ans d’existence et 150 dates, Kiosquorama a accueilli plus de 260 artistes sur une vingtaine de kiosques, parmi lesquel·les Pi Ja Ma, La rue Ketanou, Julien Granel, ou encore le groupe Cabadzi. Des talents repérés par l’œil aiguisé de la programmatrice Élodie Mermoz avant leurs succès nationaux.
Pour beaucoup, Kiosquorama reste d’ailleurs en mémoire comme la première scène professionnelle. L’association revendique son travail d’accompagnement des artistes, et se pense comme un espace de rencontre et d’expérimentation créative. Ainsi, lorsqu’il évoque les contraintes techniques liées aux kiosques (espace réduit, concerts de jour…), Frantz Steinbach aime parler de « mise en danger positive » : « Ce sont des occasions rares de tester des choses, d’être en prise directe avec le public ».
Autour de certaines éditions, des résidences sont aussi organisées avec des artistes et des publics locaux, parrainé·es d’un·e artiste venu·e d’ailleurs. L’occasion pour les premier·es de se professionnaliser, et pour les dernier·es de nouer des liens forts avec un territoire et ses musicien·nes.
Un éco-festival
Le kiosque, point de départ du festival, conditionne également une approche éco-responsable. En effet, avec une scène pré-existante, une scénographie légère et un public de proximité, le festival affiche une sobriété exemplaire « Si on enlève la technique, tout Kiosquorama rentre dans 2 vans de 15m3, et le festival tourne sur deux prises de courant classiques » se félicite Chloé Bihan.
À chaque édition, le festival met en place un village éco-citoyen avec des friperies, des associations du territoire, des artisans de l’économie circulaire… De quoi sensibiliser les citoyen·nes aux enjeux écologiques et à des modes de vie plus vertueux, tout en informant les habitant·es sur ce qui se fait de vertueux au pas de leur porte. « On crée du lien grâce à la musique pendant une journée, mais l’idée c’est que la dynamique se poursuive une fois le festival démonté », précise Frantz Steinbach.
À lire aussi : À Marseille, la Friche la Belle de Mai répond à l’urgence par la « redirection écologique »
À contre-courant
Avec un modèle d’événement gratuit, itinérant, tourné vers l’ultra-local et les artistes émergent·es, Kiosquorama semble aller à contre-courant de la filière festival. Parfois source de casse-têtes logistiques et de fragilité économique, c’est pourtant cette singularité qui permet au festival d’échapper à certaines difficultés rencontrées ailleurs (concurrence, course aux têtes d’affiche, inflation des cachets d’artistes) et même de s’exporter.
En effet, grâce à son format adapté à l’évolution des politiques culturelles et aux enjeux de l’époque – transition écologique, diversité artistique, accessibilité, mixité sociale –, l’équipe du festival est régulièrement invitée par des villes européennes à répliquer son savoir-faire. À Lisbonne, le kiosque mobile amené par Kiosquorama a même inspiré, quelques années plus tard, la construction d’un véritable kiosque à musique sur une place. Un bel hommage aux ambitions originelles de ce mobilier urbain.
Programmation, billetterie et informations pratiques sur le site du festival Kiosquorama.
- Taverny – Parc Henri Leyma, le 08 septembre. Avec Tianmi, Marco Ferreira et Morgane Imbeaud
- Paris 12 – Square Trousseau, le 14 septembre. Avec Théo Nost, Marco Ferreira et Bobbie
- Paris 15 – Square Yvette Chauviré, le 21 septembre. Avec Bobbie, Création Doux Mots Dits (Clou, Jann Beaudry, Joel Jacoulet) et Jann Beaudry
- Paris 4 – Clos des Blancs Manteaux, le 28 septembre. Avec Création Doux Mots Dits (Clou, Jann Beaudry, Joel Jacoulet), Louise Combier et Jann Beaudry