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Au-delà du bilan carbone, le nouvel enjeu de l’empreinte globale des événements culturels

par Clémence Meunier
26 mars 2025
Festival We Love Green 2023 ©Paul-Louis Godier pour La Vage Parallèle

Festival We Love Green 2023 ©Paul-Louis Godier pour La Vage Parallèle

Bilan carbone, Fairly, Seeds, GHG Protocol… Si une structure de la filière culturelle souhaite calculer son empreinte environnementale, elle a l’embarras du choix. Une bonne nouvelle car de son côté, le sacro-saint Bilan carbone, présente aussi des limites. Et se retrouve challengé par des scores RSE plus globaux. Tout dépend de ce que l’on recherche. Explications.

Article réalisé en partenariat avec Fairly.

Si le Bilan carbone semble aujourd’hui entré dans le langage courant, il s’agit en fait d’une marque déposée – d’où la majuscule qui devrait, théoriquement, toujours figurer. Le terme a été développé par Jean-Marc Jancovici, est rendu disponible par l’ADEME (l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) en 2004. « Pour utiliser cette méthode, il faut suivre une formation dispensée par l’ABC, l’Association pour la transition Bas Carbone, et disposer d’une licence à renouveler chaque année », explique Rudy Guilhem-Ducléon, auditeur Bilan carbone et chargé de mission développement durable au Collectif des festivals. « Il y a deux niveaux de formation, le premier permettant à quelqu’un de réaliser le bilan de sa propre structure, et le second d’auditer n’importe quelle structure. C’est une mesure hyper intéressante car elle permet de cartographier tous les flux d’un festival ou d’un lieu, et l’auditeur arrive à un niveau de connaissance de cette structure que peu de personnes ont. »

Dis-moi quel est ton festival, je te dirai quel est ton bilan carbone !

En dix ans, nombreux sont les acteurs culturels à s’être pliés à l’exercice. Au point que l’on commence à en connaître la petite musique. « Aujourd’hui, on a de moins en moins de surprises sur ce que nous racontent les bilans carbone. Dis-moi quel est ton festival, je te dirai quel est ton Bilan carbone ! Parfois, je m’amuse à faire l’exercice en regardant une jauge, une implantation, il me suffit de poser deux-trois questions pour tomber à peu près juste », plaisante David Irle, éco-conseiller associé du Bureau des acclimatations et co-auteur du rapport du rapport du Shift Project « Décarbonons la Culture ! ».

Il lui arrive toutefois encore d’être étonné par certains résultats, comme ceux du bilan du festival Cabaret Vert paru en 2024 et ses 25% d’impact carbone liés à l’alimentation. « Le Cabaret Vert a plutôt bien travaillé sur la réduction de l’impact de l’énergie, de la mobilité, mais moins sur l’alimentation. Par exemple, We Love Green a pu passer sur du 100% végétarien, et a fracassé son impact sur ce sujet, le divisant par sept. Le Cabaret Vert ne peut pas faire la même chose, car les parties prenantes – les élus, les prestataires – sont en résistance, et le public se dirige encore majoritairement vers les produits carnés. Et ça se voit sur le bilan du festival. »

bilan carbone événement environnement festival transition écologique
Le développement durable est au cœur de We Love Green depuis sa création. ©Louis Comar

Le Bilan carbone fait alors office d’outil de pilotage, indiquant noir sur blanc les trous dans la raquette et donc les changements à opérer. Aussi, il peut être l’opportunité pour une structure qui a du mal à modifier ses pratiques de mobiliser ses équipes, l’auditeur devant travailler main dans la main avec elles. Un moyen de mettre tout le monde autour de la table et créer un cadre de discussion collective là où il n’y en avait pas encore – ce qui est devenu plutôt rare dans une filière de plus en plus engagée et en réseau.

Faire un choix parmi la multitude de solutions

Or, tout cela a un coût. « Il faut compter au minimum 6000 euros d’accompagnement en consulting, et jusqu’à 12, 14, 15000 euros selon le niveau du consultant et l’accompagnement qu’il va proposer. Surtout, la réalisation d’un bilan carbone demandera beaucoup de temps aux équipes, car ce sont elles qui vont collecter les données », précise Rudy. Un investissement cohérent pour de gros porteurs de projets, beaucoup moins pour les petites structures, auxquelles le Collectif des festivals va alors proposer une solution d’accompagnement répondant à leurs questions spécifiques.

Faut-il mieux incinérer les mégots ou les faire recycler à 350 kilomètres du site ? Vaisselle lavable ou recyclable ? Un consultant comme Rudy, sachant décortiquer la littérature scientifique, peut obtenir ces réponses. En l’occurrence : incinération pour éviter les émissions des 350 kilomètres parcourus, et vaisselle lavable. Des choix au cas par cas qu’il est quasiment impossible de faire sans expert à ses côtés.

Car pour identifier ces questions, avoir une vision globale de son impact est souvent nécessaire. « Le Bilan carbone a l’avantage d’être normé, de fonctionner sur une méthodologie fiable, solide, et comparable d’année en année. Pour ceux qui n’ont ni le temps ni les moyens, il existe d’autres calculateurs d’impact, comme Seeds ou Fairly. Seeds, développé par Arviva, est gratuit et davantage low-tech. Il touchera un autre public que Fairly, qui est un bon outil marketing, puisqu’il permet de valoriser assez facilement les événements engagés, avec cette idée de nutri-score et cette interface aboutie visuellement. » Surtout, il s’agit ici de prendre en compte d’autres impacts que le carbone. Fairly Score prend ainsi en compte un certain nombre de critères supplémentaires pour aboutir à son score en trois parties – impact CO2 donc, mais aussi environnemental et économique et social.

À lire aussi : Comment Fairly Score veut s’imposer comme le Nutri-score des concerts et festivals

Au-delà des bilans carbones

« Depuis la création de We Love Green en 2011, on fait réaliser des bilans carbone chaque année. On est assez rodés à cet exercice et, du coup, à ses limites également : il ne prend pas en compte l’impact sur les ressources, sur l’eau, sur la biodiversité. Le festival se tenant dans des espaces naturels, cette question de la biodiversité nous intéressait tout particulièrement », rembobine Marianne Hocquard, responsable RSE du festival parisien. En 2022, We Love Green a donc commandé une petite enquête à la Ligue de protection des oiseaux, avant de passer à la vitesse supérieure cette année avec une étude d’incidence du festival sur les oiseaux, les chauves-souris, la flore et la microfaune des sols du bois de Vincennes. Réalisée par des écologues associés au Museum d’histoire naturelle et soutenue par le CNM, il s’agit-là d’une étude inédite en Europe.

Cela renforce les questionnements autour du sujet de la biodiversité chez tout le monde.

L’installation de nichoirs pour les mésanges, de balises d’enregistrement des ultrasons, les prélèvements des sols et le comptage du nombre d’espèces végétales présentes sur différentes parcelles du site ont permis aux écologues d’arriver à une rassurante conclusion : hormis dans un petit sous-bois, qui se verra recouvert d’un « Grass Protecta » (un grillage évitant le piétinement des sols), l’incidence de We Love Green sur la biodiversité du Bois de Vincennes est nulle, d’autant que le festival est implanté sur des terrains sportifs utilisés à longueur d’année, pas en pleine forêt millénaire.

« On est contents, et soulagés », confie Marianne. « Quand on a lancé l’étude, on ne savait pas ce qu’on allait trouver. C’était très risqué de s’exposer là-dessus. Mais pour autant, ça nous semblait nécessaire d’aller plus loin que nos seules mesures et protocoles de réduction du carbone. Le soutien du CNM, au-delà de l’aspect financier, était un signal fort pour nous : l’idée était de lancer un mouvement. Depuis la publication de l’étude, je reçois de nombreuses questions de la part d’autres festivals. Évidemment, on ne peut pas transposer totalement nos protocoles partout. Mais je pense que ça renforce les questionnements autour du sujet de la biodiversité chez tout le monde ». We Love Green a d’ailleurs reçu en janvier dernier le Green Operations Award lors du festival professionnel Eurosonic de Gröningen (Pays-Bas), preuve d’un intérêt croissant de la filière pour les enjeux écologiques s’écartant de l’impact carbone.

« S’attacher uniquement au carbone sans travailler sur les trois piliers du développement durable, économique, social et environnemental, ça n’a pas grand intérêt. Tout comme un Bilan carbone sans plan d’action derrière », replace Benoît Olla, directeur de L’Aéronef. En faisant réaliser un premier bilan en 2018, Benoît et ses équipes ont pu identifier leur principal point d’impact : comme pour l’immense majorité des salles et festivals, il s’agissait de la mobilité des publics.

À lire aussi : Festivals en mouvement, comment passer la seconde sur les mobilités durables

La salle de concert lilloise a alors dégainé un large plan d’action, Aéro Easy Go. Remboursement de l’aller-retour sur présentation du ticket pour ceux venant en transports en commun, mises en relation entre deux détenteurs de billets habitant le même quartier pour faciliter le covoiturage, parking offert aux voitures transportant plus de trois personnes, aide à la réparation, sessions de remises en selle et vestiaire gratuit pour les cyclistes, sensibilisation avec un stand présent à chaque concert… L’Aéronef n’a pas manqué d’idées pour inciter et informer son public. Jusqu’à organiser un temps fort annuel, Sustain, avec une programmation musicale et militante, et mettre en place d’un « Concert Score » notant, à la manière de Fairly et du nutri-score, son impact, celui des artistes et celui du public, pour chacun de ses concerts.

Et ça marche. En 2023, un deuxième calcul carbone est réalisé. Rapporté au nombre d’événements à l’année, l’impact a diminué et 438 tonnes de CO2 ont été évitées grâce, notamment, à un développement du covoiturage (9,5% d’automobilistes seuls dans leur voiture en 2023 contre 38% en 2018) et de l’usage des transports en commun (36% d’utilisation en 2023 contre 26% en 2018). Si le premier Bilan carbone de l’Aéronef utilisait la méthode officielle, la salle ayant été accompagnée par Ekodev, leur deuxième était « fait maison ». Sur les mêmes bases, mais en prenant en compte, par exemple, l’impact du numérique, et en les mettant à jour à l’aide de Seeds. Une appropriation des outils rendue possible au sein d’une équipe commençant à sacrément bien connaître son sujet. Opter pour l’officiel Bilan carbone, un score RSE plus global ou un mélange des deux fait maison est finalement une question de besoin. Tant que la rigueur est là, à chacun de choisir ce qui lui convient le mieux, en fonction du niveau d’expertise des équipes et des moyens à disposition.

Sortir du bilan environnemental carbo-centré

Cette multiplication des solutions envoie un signal fort : la filière musicale commence à vouloir se détacher du calcul de CO2 comme seule mesure d’impact, alors qu’elle était jusqu’ici très « carbone-centrée », notamment en France. « Il y a eu un mouvement en France autour du Shift Project, dont c’était l’axe de travail, au moment du Covid », rappelle David Irle.

« Mais il y a des pays qui évitent toujours de se confronter au sujet du carbone parce qu’il nous pose des questions qui fâchent, des questions de modèle économique très rarement posées par les sujets de biodiversité ou de gestion des déchets, qui sont aussi des thèmes fondamentaux, puissants et intéressants, mais qui ne nous embêtent pas en termes financiers. Après, effectivement, c’est toujours le problème quand il y a un focus sur un sujet : il ne faut pas qu’il vienne écraser les autres. Je crois qu’aujourd’hui on est en train d’arriver à articuler une vraie discussion autour du carbone mais aussi des autres enjeux de retombées sociales, d’accessibilité, d’inclusion, de justice climatique. »

Bref, comme si l’on bouclait la boucle dans une conversation avec nos voisins européens, où notre regard frenchie, très carbo-centrée, a rejoint des réflexions sur d’autres pans de la soutenabilité. « Cette diversité est une chance, conclut David Irle. Mettre la question du carbone en dialogue avec les autres manières de voir le problème, c’est ça qui va nous enrichir ».

En addition du mode festival déjà disponible, Fairly a lancé le mode dédié aux salles de diffusion. Celui-ci sera présenté à l’occasion d’un webinaire prévu le 15 avril à 11h, auquel vous pouvez vous inscrire ici.

Tags : EnvironnementFestivalTransition écologique

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